A Saint-Denis, une expulsion de plus en pleine crise sanitaire

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Lorsque vous descendez à la station de métro Saint-Denis Université et remontez l’avenue de Stalingrad, vous l’avez peut-être vu. Un terrain vague sur lequel 80 familles se sont installées.

Des expulsions à l’heure du couvre-feu

Beaucoup d’occupants, certains avec des contrats de travail, une cinquantaine d’enfants dont une partie est scolarisée non loin, et pourtant… A quelques semaines du début de l’hiver et à l’aube de la trêve hivernale, les habitants de ce terrain sont expulsés. On aurait pu penser que la situation sanitaire puis l’instauration du couvre-feu donneraient un sursis aux occupants : ce n’a pas été le cas.

Depuis plusieurs semaines, ACINA et d’autres associations constatent un phénomène de “rattrapage” des expulsions qui n’ont pas eu lieu pendant confinement. Exceptionnellement, la trêve hivernale s’était alors achevée en juillet. Mais à quelques jours du 1er novembre, date de la trêve 2020/2021, les expulsions se multiplient. A cela s’ajoute un durcissement des critères d’accès aux dispositifs de mise à l’abri (enfants de moins d’un an, femme enceinte de plus de 6 mois, handicap…) lesquels ne peuvent même pas accueillir toutes les personnes supposément prioritaires.

Une méthode irresponsable et inutile

Outre l’aspect sanitaire, les évacuations sont un vrai obstacle à l’insertion sociale et professionnelle des personnes vivant en squat et bidonville. En effet, une expulsion s’accompagne dans de très rares cas d’une mise à l’abri. Quand cette dernière a lieu, elle ne dure que trois jours et l’hébergement est parfois situé à l’autre bout du département voire de la Région.

L’équipe d’ACINA nous raconte ainsi la situation ubuesque d’une famille accompagnée par l’une antenne de l’association. “La famille (père, mère, petit garçon) est expulsée. On leur propose alors d’être relogée à 2h20 de transport du lieu où elle vivait auparavant. Résultat: ils ont dû se résoudre à dormir dans leur voiture parce qu’ils tenaient à ce que leur enfant reste scolarisé au même endroit et que le père puisse continuer à aller travailler”.

Les expulsions entraînent souvent une rupture de l’accompagnement, une rupture administrative d’abord (la domiciliation est clé dans de nombreuses démarches) et parfois relationnelle (les réseaux d’entraide sont brisés par la dispersion des habitants). Et cela peut se répéter plusieurs fois au cours de la même année. On estime qu’en moyenne une famille en bidonville est expulsée tous les 3 à 4 mois de son lieu de vie. La scolarisation est bien sûr aussi interrompue par ces évacuations à répétition.

Ce constat est largement partagé par l’ensemble des structures associatives professionnelles et bénévoles, ainsi que par une partie des institutions publiques.