Diana : l’interview du mois

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Ce mois-ci, dans l’interview du mois, découvrez l’histoire de Diana. Arrivée en France avec ses parents à l’âge de 9 ans, elle en a aujourd’hui 24. De bidonvilles en hôtels sociaux, elle vit désormais en appartement. Elle nous a raconté ses 15 ans de vie en France et son combat pour en arriver là où elle en est aujourd’hui. 

 

Diana est arrivée en France à l’âge de 9 ans avec ses parents, qui ont décidé de quitter la Roumanie pour des raisons économiques “C’est pas possible en Roumanie, et même encore aujourd’hui, tu peux gagner par mois maximum 300 ou 400 euros.” explique Diana.

Diana et sa famille sont accompagnés par l’équipe d’ACINA 91 depuis janvier 2021. Elle a connu l’association par le biais d’Elisa Riano, co-directrice des programmes chez ACINA, qui a rencontré Vandam (le mari de Diana) au sein d’un dispositif d’insertion pour des jeunes issus des bidonvilles il y a plusieurs années.

Avant de rencontrer ACINA, Diana et Vandam avaient déjà fait beaucoup de démarches pour accéder à leurs droits “Nous avons fait des choses seuls, et nous avons aussi été aidés par Michel, un bénévole de Romeurope lorsque nous habitions à Antony sur un bidonville où nous sommes restés 1 an. J’étais inscrite à la CAF, j’avais une carte vitale, j’avais ouvert une micro-entreprise et je travaillais sur les marchés, j’avais fait une demande de logement social et j’ai été reconnue prioritaire DALO.” raconte Diana.

Le bidonville sur lequel vivaient Diana et sa famille à Antony a été expulsé en 2018, laissée sans solution d’hébergement, elle est repartie en Roumanie avec sa famille pendant plusieurs mois. “Nous sommes revenus en France à Antony. Romeurope m’a aidée à scolariser ma fille et on appelait tous les jours le 115 pour avoir une place à l’hôtel, on ne savait jamais si on allait avoir une place le soir ou non. La CAF était bloquée, nous n’avions pas de ressource.” Par la suite, Diana a obtenu une place à l’hôtel à Juvisy et Solenn Daniellou (NDLR : travailleuse sociale chez ACINA dans le 91) l’a accompagnée afin de débloquer la situation CAF de la famille et actualiser le dossier de demande de logement social “Comme nous avions été reconnus prioritaires DALO, ça a été très rapide entre le dépôt du dossier et la proposition, mais nous avons ensuite eu des soucis pour accéder au logement…” explique Diana.

Quelques semaines après la réponse positive, la famille s’est rendue à un rendez-vous Solibail afin de fournir l’ensemble des pièces justificatives nécessaires. “Nous avons récupéré les clefs et j’ai prévenu l’hôtel où on était hébergés que nous n’avions plus besoin de prolonger. Nous sommes allés à l’appartement, et il y avait des cafards dans la cuisine.” Diana est alors repartie et aux côtés d’ACINA a expliqué la situation afin que le logement soit nettoyé. “Le problème c’est que j’avais laissé l’hôtel en pensant que c’était bon, nous avons donc dû retourner vivre sur un bidonville pendant 3 jours, nous avons ensuite eu un hôtel aux Ulis, c’était la catastrophe, l’hôtel était très sale.” La famille a attendu 3 mois avant de pouvoir rentrer dans un logement propre.

La famille vit depuis 6 mois dans un appartement Solibail à Massy et Diana et Vandam travaillent (NDLR : Diana est actuellement arrêtée). Avec environ 1 200 euros par mois, la famille doit payer le loyer, l’électricité, faire les courses, payer les abonnements téléphoniques et autres, l’essence, etc. “C’est pas facile, mais ça va, on arrive à se débrouiller.”

Leurs enfants, Giulia (7 ans) et Angelo (3 ans), sont tous les deux scolarisés “ça se passe très bien à l’école. Vous savez, on voit vraiment la différence, avant quand j’habitais en bidonville, Giulia a loupé beaucoup de jours d’école, parce qu’un jour on est expulsés, ça change tout le temps, un jour tu es là, un autre jours tu es là-bas, c’était très dur. La elle va à l’école tous les jours et on voit vraiment la différence. Je me suis beaucoup battue pour qu’on en arrive là aujourd’hui, pour mes enfants. Quand tu veux changer ta vie, celle de tes enfants, tu dois te battre pour sortir de ça, je me suis beaucoup battue, je donnerai ma vie pour mes enfants.” raconte Diana.

Les difficultés rencontrées par Diana dans son parcours l’ont beaucoup atteinte “Passer une partie de ma vie en bidonville m’a beaucoup marquée, mes enfants aussi. J’ai été obligée de faire la manche à des moments où je n’avais aucune ressource, qu’il fallait acheter des couches ou du lait pour les enfants qui sont des produits très chers. J’ai arrêté aussitôt que les choses se sont débloquées. Je voulais sortir de cette vie. Ca a été trop difficile pour moi d’arriver là où je suis ici, ça a été très dur dans ma tête, maintenant, je peux te dire que ça va.” nous confie Diana. 

Aujourd’hui, Diana aide les gens qui ne comprennent pas bien le français et qui vivent des situations qu’elle même a pu vivre, dans leurs démarches d’accès aux droits.

Diana a par ailleurs participé à l’exposition présentée par ACINA à la Mosquée des Tarterêts en Essonne, un moyen de médiation pour apaiser les tensions existants entre les habitants du quartier et les habitants d’un bidonville, déconstruire les préjugés, expliquer les conditions de vie des familles et les raisons de la migration et répondre aux interrogations. “J’avais cuisiné un très gros gâteau qui m’a pris plusieurs heures à réaliser! Là-bas j’ai parlé pour expliquer mon parcours, ma vie, et on a eu beaucoup de questions, tout le monde m’a dit que j’étais très courageuse.” Ce projet a fait l’objet d’un article dans notre newsletter du mois de novembre, vous pouvez le retrouver ici.

Début décembre, la famille a également participé aux rencontres nationales de Romeurope à Lille sur la thématique du renforcement du pouvoir d’agir des premier.es concerné.e.s. “Là-bas j’ai vu combien de personnes se battent pour aider les gens qui vivent en bidonvilles à sortir de cette vie. J’ai vu une grande force, j’étais trop contente quand j’ai vu ça. Je n’ai pas pris la parole mais j’ai écouté, nous sommes restés là-bas de 9h à 18h, après nous avons pu nous promener dans Lille et aller au marché de noël avec les enfants” raconte Diana.

Pour finir sur de joyeux souvenirs en cette fin d’année, Diana nous a parlé de la journée à la mer organisée par ACINA en juillet 2021 “C’était très bien, c’était la première fois que mes enfants voyaient la mer, ils ont joué, c’était bien.” Nous les avons également retrouvés lors de la fête de fin d’année solidaire !

Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose ?

Non, seulement je dis merci à ACINA, qui m’a vraiment beaucoup aidé, on a travaillé ensemble et maintenant je suis là où j’en suis. ACINA est comme ma famille, quand je vais à Corbeil (NDLR : les locaux d’ACINA dans le 91), je me sens comme chez moi.”

Merci à Diana, de nous avoir raconté son histoire, une femme inspirante, forte et courageuse qui n’a cessé de se battre pour faire valoir ses droits et accéder à de meilleures conditions de vie.