Selon le rapport annuel 2021 de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie en France, les roms sont toujours perçus de manière négative, ils “restent particulièrement rejetés” et “Certains préjugés qui touchent les Roms migrants continuent d’être répandus, malgré une baisse cette année. Ainsi, 67 % (- 1 point par rapport à 2019) des Français considèrent que les Roms sont pour la plupart nomades, 55 % qu’ils exploitent très souvent les enfants (stable), 51 % (- 2 points) qu’ils ne veulent pas s’intégrer en France et 45 % (- 3 points) qu’ils vivent essentiellement de vols et de trafics.”
Si nous nous tournons du côté des premier.e.s concerné.e.s, selon une enquête de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) de 2019 sur la situation des Roms et des Gens du voyage en Belgique, en France, en Irlande, aux Pays-Bas, en Suède et au Royaume-Uni, “près de la moitié des Roms et des Gens du voyage interrogés (45%) se sont sentis discriminés au cours des douze derniers mois dans au au moins un des dix domaines de la vie sur lesquels portait l’enquête” (la recherche d’emploi, le travail, l’éducation, les relations avec le personnel scolaire en tant que parent ou tuteur, l’accès aux soins de santé, le logement, l’utilisation des transports publics, les bureaux administratifs, etc.). “Près de la moitié des Roms et Gens du voyage ayant répondu à l’enquête (44%) ont déclaré avoir vécu un harcèlement motivé par la haine au cours des douze mois précédant l’enquête.” Ces chiffres révèlent l’existence de discriminations quotidiennes persistantes depuis de bien trop nombreuses années et mettent en lumière la nécessité de poursuivre des actions de plaidoyer inter-associatif. Les fausses rumeurs relancées en octobre dernier concernant de prétendus enlèvements commis notamment par des personnes roms ne font que confirmer ce constat (voir articles en revue de presse).
La promotion des droits de l’homme et la prévention de toute discrimination est au coeur du travail mené par ACINA et constitue un de ses quatre principes d’action. En cette fin d’année, ACINA a participé à deux tables rondes organisées par la Fondation Abbé Pierre et par le Département de la Seine-Saint-Denis. “Combattre les discriminations en matière d’habitat” était le sujet de la première, “Discrimination environnementales : mieux les connaître pour mieux agir” celui de la seconde.
Dans le cadre de son “éclairage régional sur l’état du mal-logement en France”, la Fondation Abbé Pierre a organisé tout au long du mois d’octobre des tables rondes sur divers sujets en Ile-de-France. ACINA – représentée par Elisa Riano, directrice des programmes pour la Seine-Saint-Denis et le Val-d’Oise – a été conviée à participer à celle intitulée “Combattre les discriminations en matière d’habitat”, animée par Profession Banlieue. Dans notre interview avec le chercheur Louis Bourgois, nous évoquions les difficultés d’accès au logement et le point aveugle que constituent les bidonvilles et squats au sein de la politique du Logement d’abord. Les publics qui vivent en habitats précaires, souvent considérés comme “ni sans-abris ni en logement” sont orientés vers de nombreux “sas” (hôtels,, villages d’insertion, etc.) avant d’y accéder, ballotés au gré des expulsions, sans proposition de relogement ou inscrits dans des parcours résidentiels longs en hébergement d’urgence. Une illustration parmi tant d’autres des discriminations dont sont victimes ces publics en matière d’habitat. Le compte rendu de la table ronde est disponible ici.
ACINA a également été conviée le jeudi 20 octobre à la 2ème rencontre sur la lutte contre les discriminations organisée par l’Observatoire des inégalités du département de la Seine-Saint-Denis. Aurore Krizoua, chargée de mission juridique chez ACINA et Lana Breuzé, chargée de missions chez ACINA sont intervenues aux côtés de Cécile Duflot (directrice générale d’Oxfam), Valérie Deldrève (directrice de recherche en sociologie à l’INRAE) et Hilème Kombila (docteure en droit et présidente de Notre Affaire à Tous Lyon) à la table ronde “Discriminations environnementales : mieux les connaître pour mieux agir.” Des regards croisés pour une mise en lumière du concept même de discriminations environnementales, ce qu’elles recouvrent et la manière dont elles se matérialisent sur le terrain touchant en premier lieu les publics les plus précaires à travers le monde. Sur les bidonvilles, la discrimination environnementale s’observent à plusieurs échelles : la localisation (en périphérie des villes, aux abords d’autoroutes, de chemins de fers, sur des terrains pollués aux métaux lourds, etc.) et l’absence d’accès aux services essentiels de base (eau, toilettes, ramassage des ordures, électricité, etc.). Les conséquences sur la santé en sont multiples : une espérance de vie nettement inférieure au reste de la population (environ 30 ans de moins), des développements de pathologies liées aux mauvaises conditions sanitaires (problèmes respiratoires, dermatologiques, gastro-intestinaux, saturnisme infantile, etc.), une exposition accrue aux épidémies et au changement climatique (canicule, grand froid, etc.) et des conséquences sur la santé mentale désastreuses. A cela s’ajoute la difficulté d’accès aux soins par – entre autres – une méconnaissance et un éloignement des structures d’accès à la santé ou encore des discriminations aux guichets, qui amplifient les conséquences du préjudice environnemental subi.
Par des actions de sensibilisation et d’information de ce type, ACINA tente de répondre à la mission qu’elle s’est fixée, “esquisser de nouveaux horizons” vers un monde qui promet à chacun.e un digne exercice de son appartenance à la société et la libre jouissance de ses droits fondamentaux sans distinction de race, d’âge, d’origine, de sexe et de convictions.